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Le Soleil Blanc


Le Soleil Blanc


L'astre du jour est sans taches...depuis 48 jours d'affilée.
En témoigne cette image du Soleil (ci contre), prise par
l'instrument MDI du satellite européo-américain SOHO.
 

Elle montre un Soleil «blanc»...
Depuis 2008, le Soleil est en phase calme de son cycle
d'environ 11 ans, marqué par le nombre de ses taches.
Mais le calme actuel est en train de battre le record
du siècle. Une phase calme moyenne se traduit par 485 jours
sans tache. Or, les spécialistes en ont déjà compté 701
depuis 2004, dont 190 jours en 2009, soit 79% du temps.
Si aucune tache ne se montre d'ici cinq jours,
le Soleil aura alors battu son record séculaire de quiétude.
Cette phase exceptionnelle aura t'elle un effet sur
le climat terrestre ? En toute logique oui, puisqu'elle
se traduit par une légère diminution de l'énergie solaire
reçue par la Terre. Ce phénomène est ainsi pris en
considération comme cause de variation climatique dans
un article récent de Judith Lean et David Rind paru dans
Geophysical Research Letter où les deux auteurs tentent
une prévision climatique sur les 10 prochaines années.
 

En tenant compte des gaz à effet de serre, des éruptions
volcaniques, de l'oscillation Niño/Niña sur le Pacifique
et de l'éclairement du Soleil, les deux scientifiques pensent
avoir l'explication des trois quarts des évolutions de la
température terrestre (mesurée près du sol ou de l'eau)
depuis plusieurs décennies. Appliquant ces différentes
causes au 10 prochaines années, ils prévoient un
réchauffement un peu plus rapide d'ici 2014, puis une
quasi stagnation entre 2014 et 2019. L'intérêt d'une
telle prévision est surtout... que son échéance est assez
courte pour qu'on puisse la vérifier.
Le Soleil nous présente une face toute propre en ce moment.
Sans taches. Donc,il dort. Et, peut-être, nous chauffe
un peu moins. Au point de modifier le climat? De compenser
l’inéluctable réchauffement provoqué par nos émissions
de gaz à effet de serre? Logique de s’interroger ainsi,
puisque l’astre du jour demeure le principal responsable
du chauffage de la maison bleue. Cette affaire de taches,
des relations entre le Soleil et le climat terrestre,
a pris un tour polémique, dans les labos et les gazettes.


AVEC TACHES





SANS TACHES

 
Au point, explique Thierry Dudok de Witt
(université d’Orléans, CNRS), de susciter parmi les
scientifiques attachés à une certaine discrétion studieuse
«la crainte de s’impliquer dans un débat devenu très politisé».
Une «méfiance» justifiée par le «discrédit jeté sur la
discipline par des annonces et des publications fracassantes
de scientifiques plus soucieux de bruit médiatique, lié à
la sensibilité de la société au problème climatique » que
de travail sérieux. Slimane Bekki, (Latmos, laboratoire
atmosphère,milieux et observations spatiales,CNRS), parle
lui d’un «débat scientifique intéressant qui a été biaisé
par les climatosceptiques.

Ils ont voulu à toute force en
tirer la conclusion: c’est le Soleil, pas l’homme, qui est
responsable des évolutions climatiques, inutile de se
préoccuper des émissions de gaz à effet de serre».
Alors que le sujet mérited’être éclairci souligne ce
spécialiste en modélisation de la chimie atmosphérique,
afin de «comprendre le passé, le simuler avec les modèles
actuels, prédire le futur».
Donc, le Soleil s’endort. En 2008, les astrophysiciens
ont pu compter 266 jours sans taches sur le Soleil, soit
73% de l’année. Logique, au premier abord, puisque l’astre
se trouve dans la phase calme de son cycle de onze ans,
caractérisé justement par l’augmentation puis la diminution
du nombre de taches. Sauf qu’il faut remonter à 1913 pour
trouver mieux, avec 311 jours sans taches, soit 85% de l’année.
Et pour 2009? Début avril, on en était à 87% de jours sans
taches, et le cycle encours bat des records de durée.
Il n’en fallait pas plus pour que
la machine à spéculer s’emballe.
Et si cette phase de calme exceptionnel allait se prolonger…
Voire compenser le réchauffement prévu par les climatologues?
L’hypothèse repose sur la connaissance du passé. Depuis
l’invention de la lunette astronomique, dont le premier
utilisateur fut Galilée, des astronomes comptent le nombre
de taches à la surface du Soleil. Des zones moins brillantes,
qui semblent sombres dès lors que l’on observe le Soleil
avec un filtre. Mais qui sont entourées de «facules»
plus brillantes, au point que le surcroît d’énergie
qu’elles apportent domine. Bref, plus de taches
signifie un Soleil qui chauffe plus la Terre.
Sous le roi Soleil –LouisXIV–, des astronomes s’interrogent.
Pourquoi ne voient-ils plus de taches? Ils ne le savent pas,
mais ils commencent à vivre une longue période, de 1615 à 1720,
qui sera connue plus tard sous le nom de «minimum de Maunder».
Près d’un siècle où les cycles de onze ans du Soleil,
du moins leur expression sous la forme des taches visibles
à sa surface , vont pratiquement disparaître.
surtout sensible en Europe et Amérique du nord,
baptisé «petit âge glaciaire».
Par la suite, les cycles solaires de onze ans se sont de
nouveau manifestés par des taches nombreuses. Avec, toutefois,
un nouveau coup de mou entre 1795 et 1835, dénommé le
«minimum de Dalton». Depuis que l’on se passionne pour
l’histoire récente du climat, en raison des craintes
pour son futur, de nombreux scientifiques ont tenté de relier
ces périodes de Soleil maussade à l’évolution du climat terrestre.
Le succès est mitigé. Si cela semble coller pour le
petit âge glaciaire, la corrélation est moins nette
pour le minimum de Dalton.


En outre, cette période est
encadrée par des éruptions volcaniques géantes
(le Laki en 1783 et le Krakatoa en 1883)
qui ont eu un impact majeur sur le climat.
«La recherche d’une explication physique et d’une
quantification de l’effet climatique de ces minima
d’activité solaire, tant à l’échelle du siècle que
pour le cycle de onze ans lorsqu’il se manifeste par
ses taches, a pour l’instant échoué», souligne Edouard Bard,
Professeur au Collège de France.


Les mesures par satellites
de l’activité solaire et le suivi des températures
devraient permettre d’établir un lien quantifié entre
cause et effet. Or, là aussi, c’est l’échec puisque
l’explication la plus simple – la hausse ou la baisse
de la quantité d’énergie reçue par la Terre – ne suffit pas.
Entre le point haut et le point bas d’un cycle de onze ans,
elle ne peut expliquer directement que 0,1 à 0,2°C
d’écart de température moyenne annuelle. Surtout,
insiste Slimane Bekki, «l’évolution des températures
depuis plus de trente ans n’est pas du tout en phase
avec les cycles solaires, mais plutôt avec
l’intensification de l’effet de serre».
Devant cette difficulté, d’autres hypothèses ont surgi
pour relier Soleil et climat terrestre par des effets
amplificateurs des variations du premier.
Certains ont évoqué la partie la plus énergétique de
son spectre, en particulier les ultraviolets qui
produisent de l’ozone –un gaz à effet de serre–
dans la stratosphère.Or, explique Bekki «si l’énergie
totale émise par le Soleil ne varie que de 0,1% entre
haut et bas du cycle, la contribution des UV, elle,
varie de 8%.» Une piste? «Pour comprendre mieux
l’interaction Soleil-Terre, oui, pour
expliquer les variations climatiques,
cela reste loin du compte», estime- t-il.
Autre possibilité: les rayons cosmiques et leur
influence sur la formation des nuages.
Avancée notamment par le Danois Henrik Svensmark.
Elle est reliée au Soleil, car plus l’astre se
calme et moins il protège la Terre des rayons
cosmiques galactiques. Et ces derniers favorisent
la formation de nuages (via les aérosols).
Mais les nuages sont malicieux: même si tous ont un
double effet (refroidissant et réchauffant),
le bilan est en faveur du froid pour ceux de basse
altitude et du chaud pour ceux de haute altitude,
or, il semble que si l’effet rayons cosmiques joue,
ce serait plutôt en faveur des nuages bas…à
l’inverse de l’hypothèse initiale, en 1997, du Danois.
Cette piste a reçu plusieurs infirmations récentes.
D’abord, l’effet devrait affecter plus fortement les
hautes latitudes que les basses. Et ce n’est pas le cas.
Ensuite, les corrélations temporelles entre la nébulosité
observée par satellite et l’intensité des rayons cosmiques,
entrevues un temps par Svensmark, se sont évaporées dès
que des périodes plus longues (entre 1983 et 2007)
ont été étudiées. Enfin, un article récent(1)
de Jeffrey Pierce et Peter Adams de Carnegie Mellon
University, aux Etats-Unis, montre que ce mécanisme
serait trop faible pour expliquer une corrélation (non établie)
entre le cycle solaire et la couverture nuageuse.
Faut-il pour autant laisser tomber la piste solaire?
Surtout pas, plaide Edouard Bard, qui insiste à l’inverse
sur l’ampleur des efforts en cours au niveau mondial.
Grâce aux satellites l’observation du Soleil débouche sur
des modèles de plus en plus sophistiqués, comme celui
de Sylvaine Turck-Chièze du service d’astrophysique au
Commissariat à l’énergie atomique. Edouard Bard dirige
un vaste programme d’étude du berylium-10 et du carbone-14,
produits dans l’atmosphère par les rayons cosmiques et que
l’on retrouve dans les glaces polaires, les cernes des arbres,
les sédiments marins ou les coraux.


Objectif de ces études qui mobilisent un accélérateur
de particules (Aster)
installé au Cerege( 2) à Aix-en-Provence:
élucider le mystère des minima de
Maunder et de Dalton, quantifier leurs effets climatiques.
Comme la plupart des climatologues, Bard garde l’esprit
ouvert en attendant la mise en service de Cloud,
une expérience du Cern, le plus grand labo de physique
des particules mondial, près de Genève, qui devrait étudier,
in vitro, l’hypothèse du lien entre les rayons cosmiques
et la formation des nuages.


Dans quelques années,
espère Edouard Bard, l’accumulation de ces travaux
menés dans un cadre pluridisciplinaire pourrait permettre
de «mieux comprendre le passé du climat terrestre
et ses relations tumultueuses avec le Soleil»,
mais également de prévoir si ce dernier est susceptible
de nous donner un coup de pouce en atténuant
le coup de chaud provoqué par nos émissions de gaz à
effetde serre. Pour l’instant, insiste t-il,
il serait imprudent de compter dessus. 



 

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Bonne Journée
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